mercredi 23 février 2011

Ceux qui sauront de Pierre Bordage

2008 ... deux adolescents que tout oppose :
-Jean est ce que l'on nomme un "cou noir", un fils d'ouvrier asservi, juste programmé pour travailler afin de survivre, interdit d'instruction et de savoir, à la merci des aristocrates qui peuvent décider de son sort lorsqu'ils le désirent ..
- Clara, elle, fait partie des nantis, d'une haute famille de nobles, promise à un haut parti afin de permettre à sa famille de réaliser des alliances, quelque part elle n'a pas plus le choix que Jean de son avenir ...

Ces deux là n'auraient jamais du se rencontrer, ni s'attirer et pourtant ...

Car la Révolution de 1789 a belle et bien eu lieu, le roi Louis XVI a bien été décapité, sauf ... que le peuple malgré sa prise des armes, n'a jamais pu faire appliquer la Déclaration des Droits de l'Homme et du Citoyen ... Les années, les siècles ont passé et la société n'a pas évolué malgré plusieurs révolutions, terriblement réprimées, en 1871, 1905, 1941, 1955 et 1982. En 1882, le Parti de l'Ordre a renversé le gouvernement de Gambetta, fait exécuter Jules Ferry et hissé sur le trône Philippe VII. Et depuis lors la grande majorité de la population n'a pas accès au progrès dont bénéficient la noblesse et la grande bourgeoisie.

En 2008, Le roi Jean IV règne à Versailles, la capitale du Royaume depuis 1882, tandis que le peuple opprimé se meurt de faim. C'est un monde moderne où seul le progrès social a été figé à l'époque des Temps modernes.
L'électricité existe mais uniquement pour les nantis, le téléphone n'a pas été développé par peur d'une communication parmi le peuple, mais un système qui s'apparente à notre internet, s'appelant le R2I, s'est développé, les moyens de transport sont actuels : avions, voitures.
Le contraste entre les deux strates de la société est poussé à son paroxysme :
Les cous noirs se battent à coups de fusils rouillés, s'éclairent à la lanterne, travaillent comme des esclaves pour un salaire de misère, risquent le Bagne s'ils apprennent à lire et à écrire, et la mort s'ils se révoltent contre le régime, tandis que les nantis se chauffent et mangent à leur faim et répondent aux émeutes aux commandes de chars, lançant des obus.
Et en même temps, les problèmes inhérents à notre propre époque sont mis en valeur : la délocalisation à l'étranger (là dans les colonies où la main d'oeuvre est moins chère), le manque de pétrole (parce que le Califat a fermé ses frontières à l'Europe), les aristocrates payent des émeutiers pour ouvrir le feu lors des manifestations et ainsi justifier l'intervention armée de la garde.

Ceux qui sauront est un livre jeunesse, le style de Pierre Bordage est aisé, facile à lire, les chapitres s'enchainent en mettant l'accent sur l'un puis l'autre des deux héros avant leur première rencontre, c'est évidement très manichéen comme souvent dans ces livres destinés à la jeunesse (ce qui est un peu regrettable). Mais on se laisse très facilement porter par l'histoire, je lui reprocherai juste un peu trop de platitude, dans le sens que cela manque un peu de sentiments.
Le livre aurait gagné à approfondir un peu plus les ressentis des personnages, leurs réelles souffrances ou joies, qui ne sont en fin de compte qu'effleurées. Ce qui amène un peu à manquer d'empathie envers les deux adolescents dont on suit les aventures sans vraiment se sentir touché.

Pour le reste, c'est un bon livre jeunesse, destiné notamment aux adolescents, l'uchronie est bien mise en place et les divers rappels historiques permettent facilement de se repérer dans le récit.
Il existe une suite à ce livre, Ceux qui rêvent que je lirai par la suite.

Ce livre a été parcouru dans le cadre du challenge Winter Time Travel de Lhisbei.

Extraits
"Liberté, égalité, fraternité, trois mots magnifiques, n'est-ce pas ? Trois mots qui formaient le coeur de la Révolution. Trois mots qui, si nous avions su les cultiver, auraient changé la face du monde."

"Nous ne sommes pas libres, nous ne sommes pas égaux, nous ne sommes pas fraternels. Nous avons transporté dans notre siècle, les maux qui caractérisaient l'ancien régime, l'ordre social, l'injustice, la peur, la misère, l'ignorance, la famine."

Elle heurta un corps inerte. Poussa un cri d'horreur lorsqu'elle reconnut le visage de Marie. La fillette paraissait dormir, les yeux clos, le visage paisible. Elle avait reçu une balle en plein coeur.

Croire au destin c'est renoncer à sa liberté d'être humain.

Ailleurs
ActusSF ; mes imaginaires ; RSF Blog ; El Jc ; Spocky ; Cachou ; Anudar

5 commentaires:

  1. Ah, c'est de la jeunesse ça ? Oo Ben mince alors, chez nous il est classé en adulte ! Faudra que je le regarde un peu plus, il me paraît sympatoche !

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  2. J'étais un peu restée sur ma faim en lisant ce roman. Bordage peut mieux faire je trouve! ;)

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  3. @Anudar, quand tu veux :p

    @shaya, oui c'est de la jeunesse, il est sympa à lire mais pas extraordinaire quand même.

    @Phooka, je n'ai aucune autre référence Bordage dans la mesure où c'est une découverte de l'auteur, néanmoins j'ai entendu beaucoup de négatif sur lui.

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  4. J'ai hâte de lire ton commentaire sur "Le maître du Haut Château" de Dick. Je suis en train d'en rédiger un moi-même aussi, qui va peut-être se placer dans le cadre du challenge sur l'uchronie, et j'ai du mal, parce que c'est au roman beaucoup plus subtil, riche et complexe qu'il n'y paraît. Difficile aussi de faire voir la lumière aux aveugles.

    Jack Kerouac

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